Le Caucase

Manifestations en Arménie, le gouvernement ne s’en sort pas

La semaine de manifestations qui vient de s’écouler avec comme point culminant la réunion de près de 5 000 personnes devant le palais présidentiel est le signe d’un profond mécontentement. Le gouvernement accumule les erreurs dans la gestion du pays sans trouver pour le moment quelque solution que ce soit à la crise. Des manifestations qui pourraient enfler encore jusqu’à se transformer en contestation plus virulente.

 

Ce qui ressemblait jusqu’à présent à des manifestations de mécontentement pourrait être sur le point de se muer en printemps arménien. Une semaine de manifestations et de contestations plus tard, aucun signe d’apaisement n’a été envoyé par le gouvernement. Un gouvernement pourtant à l’origine de ces rassemblements, de par son annonce d’une énième hausse des tarifs de l’électricité. Une hausse qu’on essaie de tempérer côté pouvoir politique mais la pilule a beaucoup de mal à passer: +17% d’augmentation des tarifs en une seule fois, cela fait beaucoup. Imaginons simplement ce que provoquerait une telle annonce en France… Près de 20% d’augmentation engendrerait un soulèvement général des particuliers et des manifestations dans la plupart des grandes villes.

 

Force est de constater que le gouvernement arménien ne sait comment se dépêtrer de cette situation chaude et qui pourrait devenir brûlante. A peine a-t-il eu l’initiative d’envoyer des responsables des forces de l’ordre discuter avec les manifestants en vue d’apaiser les tensions. Mais ce n’est pas suffisant. Loin de là. Il s’agit pour le gouvernement de prendre ses responsabilités, d’assumer ses erreurs de gestion et de trouver une réelle voie de sortie de crise. Car derrière la hausse des tarifs de l’électricité, c’est bien une crise profonde qui tenaille le pays tout entier.

 

Crise économique et incapacité politique

 

Les manifestations qui soulèvent le pays sont à intégrer dans un cadre plus large d’une crise économique sévère pour les populations.

 

Si les tarifs de l’électricité ont drastiquement augmenté, ils ne sont pas les seuls.

La plupart des produits et des services ont subi le même sort, tout comme la branche de l’agroalimentaire. Des mesures soit décidées par le pouvoir actuel soit subies par le contexte économique de la zone géographique.

Mais dans tous les cas de figure, le gouvernement a laissé faire. L’exemple des tarifs de l’électricité est à ce titre significatif : la société russe qui fournit l’énergie au pays a demandé au gouvernement d’augmenter les tarifs, chose qu’il a faite sans tenter quelque négociations que ce soit. Au final, ce sont les ménages qui paient et qui paient le laisser-aller du gouvernement.

 

Les promesses de jours meilleurs annoncés depuis l’adhésion de l’Arménie à l’Union Economique Eurasiatique, cette zone de libre-échange avec la Russie, le Kazakhstan et la Biélorussie, non pas été tenues. Le pays ne bénéficie pas des effets positifs escomptés sur l’économie et promises par le gouvernement : l’accès aux marchés extérieurs est des plus complexes, les marchandises arméniennes – produits agricoles en tête – ne s’écoulent pas comme prévu… De là à ce que l’adhésion à l’UEEA soit remise en question, il n’y a qu’un pas. Car des voix s’élèvent à présent pour faire savoir au gouvernement qu’un rapprochement plus marqué avec l’Union Européenne aurait été bien plus pertinent. Les populations commencent à nourrir quelques regrets sur la question et à remettre en cause la capacité des pouvoirs publics à donner une direction positive à l’économie toute entière.

 

Il devient urgent pour l’Arménie d’être en capacité de trouver de réelles mesures de sortie de crise, de redresser rapidement la barre d’une économie qui patine, d’envoyer des signaux forts aux Arméniens. Mais le silence du pouvoir actuel prouve qu’il ne sait comment s’en sortir, et toute tentative de sa part de dénoncer une quelconque manipulation politique serait veine tant la pluralité des profils des manifestants est importante : un mouvement apolitique mêlant toutes les générations qui est bien la preuve qu’une grave crise de confiance s’installe.

Une incapacité politique bien dommageable pour le pays.